Le bénéfice de la réunification familiale a été étendu lors de la dernière réforme de l’asile et de l’immigration. Interview d’Alain Régnier, préfet, délégué interministériel à l’accueil et l’intégration des réfugiés, qui s’est également engagé à simplifier la procédure.
Pourquoi avez-vous fait de la réunification familiale un des axes de la Stratégie nationale d’accueil et d’intégration des réfugiés ?
C’est une question très sensible. Je constate à chacun de mes déplacements sur les territoires, en échangeant avec des réfugiés, à quel point ils souffrent d’isolement et de culpabilité envers une famille restée au pays et confrontée à la violence, la précarité ou la faim. Il est alors extrêmement difficile de construire un projet d’intégration.
Compte tenu de ces difficultés, j’ai souhaité que la réunification familiale soit l’un des axes de la stratégie nationale d’accueil et d’intégration des réfugiés validés lors du comité interministériel à l’intégration du 5 juin dernier. [encart]
En quoi les difficultés de réunification peuvent-elles constituer un frein à l’intégration des personnes ?
Elles peuvent freiner l’intégration à plusieurs titres. Lors d’une visite dans un centre AFPA en région, un formateur m’a indiqué qu’un des participants avait dû abandonner sa formation car la procédure de réunification familiale lui prenait tout son temps et toute son énergie.
La réunification familiale reste une formalité trop longue et compliquée. Il faut recueillir tous les papiers nécessaires et constituer un dossier dans un pays qu’on ne connaît pas, sans réseau ni maîtrise de la langue.
Se pose aussi la question de l’accueil des familles quand elles se retrouvent. Pour les personnes qui arrivent, qui ne parlent pas le français et qui doivent tout découvrir, un nouveau parcours commence. Par ailleurs, le logement n’est pas forcément adapté à la taille de cette famille réunie. Pour certains, il faut combler les vides laissés par la séparation. Pour d’autres, cela peut être un moment de répit au cours duquel les traumatismes risquent de remonter à la surface dans toute leur violence.
Quelles modifications la nouvelle loi de l’asile et de l’immigration apporte-t-elle au droit de réunification familiale ?
La loi du 10 septembre 2018 « pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie » a prévu des mesures de simplification pour les réfugiés, qui entreront en vigueur le 1er mars prochain.
D’abord, l’accès à la carte de résident de 10 ans est sécurisé pour les membres de la famille des réfugiés mineurs via la suppression de la condition de résidence régulière posée pour l’admission au séjour des membres de famille de réfugiés (conjoint, s’il est mineur son ascendant). Ensuite, les conditions de réunification familiale pour les mineurs ou majeurs réfugiés sont harmonisées via l’extension du bénéfice de la réunification familiale aux frères et sœurs de mineurs réfugiés accompagnant leur parent rejoignant.
En quoi cette harmonisation est-elle souhaitable ?
La réunification familiale est un droit fondamental dont peuvent se prévaloir l’ensemble des réfugiés en France, pour assurer le droit à une vie privée et familiale, comme l’énonce l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et n’est soumis à aucune condition de ressources.
Je sais que ce droit est précieux et que les familles réfugiées doivent être soutenues. Vous pouvez compter sur mon engagement pour que les choses changent en la matière.
Axe 3 : Simplifier la réunion de la cellule familiale Action n° 53 : Fluidifier la procédure de réunification familiale La récente plateforme « France Visa » ministère de l’intérieur/ ministère des affaires étrangères va sensiblement faciliter les démarches de réunification familiale […]. Une sensibilisation des travailleurs sociaux aux questions de réunification familiale est à mener. Le Lab participera à objectiver le nombre de personnes susceptibles de venir en France via cette procédure afin d’anticiper les politiques publiques. […] De plus, dans le cadre de la refonte du paquet asile au niveau européen, la France soutient la proposition d’élargir la définition de “membres de la famille” aux familles constituées en transit et ainsi de leur ouvrir le droit à la réunification familiale. Afin de ne pas fragiliser la cellule familiale, une attention particulière doit être portée sur l’accès aux droits des personnes issues d’une réunification familiale […]. Par ailleurs, l’adéquation des logements initialement mobilisés aux nouvelles compositions des ménages devra être anticipée. |