Psychologue clinicienne, Lucia Bley a intégré l’équipe clinique du Centre Primo Levi en septembre 2023. Elle évoque ses motivations et ce qui l’a marquée depuis son arrivée.
Quel est ton parcours ?
J’ai travaillé plus de dix ans en psychiatrie adultes et adolescentes, à Saint-Anne et Ville Evrard. Juste après mon diplôme, j’avais d’abord exercé quelques temps au SAMU Social de Paris ainsi qu’en centre d’hébergement d’urgence et de réinsertion.
J’y ai développé un intérêt pour la question la clinique de l’exil et de la précarité, qui étaient bien évidemment très présentes aussi en psychiatrie à l’hôpital. Les patients que je recevais à l’hôpital venaient de partout, il y avait des histoires terribles d’exil et de trauma mais aussi des situations de précarité sociale très avancée.
Pourquoi tu as voulu rejoindre le Centre Primo Levi ?
Cela faisait sens avec mon parcours, avec les sujets qui m’intéressaient. Je connaissais le Centre Primo Levi depuis l’université car j’ai fait mes études à Paris 7, une faculté d’orientation analytique. J’y avais déjà entendu des interventions de collègues actuels. J’avais aussi déjà lu la revue Mémoires.
C’est surtout l’idée que je me faisais du travail clinique au centre de soins qui m’a donné envie, c’est-à-dire la pluridisciplinarité, l’orientation analytique et la dimension politique. Je savais qu’il y avait aussi beaucoup de participation à des colloques et à des formations, et après un travail de thèse et des chargés de cours à l’université, j’avais très envie de poursuivre le travail de transmission de la pratique. Les lieux de soins qui maintiennent des espaces d’élaboration et de réflexion articulant théorie et clinique sont précieux et de plus en plus rares.
Qu’est-ce qui t’a marqué dans la pratique du Centre Primo Levi ? ?
J’ai tout de suite été frappée par la qualité et la fluidité des échanges cliniques entre les psychologues, médecins, assistantes sociales et juristes. On n’est pas dans un rapport chiffré à la clinique. Chaque fois qu’on parle d’un patient, on parle d’une personne, de son histoire, de son rapport subjectif à ce qui lui arrive.
C’est aussi une structure qui pense la question de l’accueil des patients du début à la fin de la prise en charge. C’est un sujet essentiel au regard de la violence et du désaccueil que connaissent les patients du Centre Primo Levi. La possibilité offerte à la personne de parler de choses extrêmement intimes et traumatiques dans sa langue maternelle, ou celle dans laquelle elle se sent le plus à l’aise de parler, est un choix éthique très fort, un parti pris d’hospitalité. Bien sûr que le soin psychique sans parole, c’est compliqué ! Au Centre Primo Levi, la langue n’est pas un problème, au contraire elle fait également partie de ce qui constitue la personne, ce avec quoi elle vient et nous nous adaptons à cela, notamment à l’aide des interprètes professionnels. C’est une donnée de la rencontre.