À l’occasion du 26 juin, journée internationale pour le soutien aux victimes de la torture, le Centre Primo Levi publie son rapport annuel 2021 intitulé « Soigner, mobiliser, transmettre, un engagement intact ». Après deux ans de crise sanitaire, nos patients sont de retour, notre équipe a tenu, l’engagement est intact malgré la fatigue, avec l’envie de construire l’avenir et de transmettre son expérience à celles et ceux qui travaillent au contact des personnes exilées. La crise sanitaire a enfin confirmé une tendance déjà présente en 2019 : une très forte précarisation des personnes exilées et une difficulté d’accès aux droits du fait de la dématérialisation des services publics.
2021 a été une année « entre-deux », entre les vagues de la crise sanitaire et une décrue qui ne disait pas son nom. Le Centre Primo Levi est resté debout. Les patients sont restés eux aussi, leur besoin d’écoute et d’accompagnement est plus visible et important que jamais, et, peu à peu, ils ont commencé à revenir physiquement. Deux ans de crise sanitaire ont imposé un rythme très soutenu à notre équipe pour faire face à des besoins élevés en termes de soins psychologiques et médicaux. La fatigue est forte mais elle n’est pas propre au Centre Primo Levi. La lassitude et l’épuisement touchent de plus en plus celles et ceux qui travaillent au contact des personnes exilées. Ils font part de leurs incertitudes, de leur manque de moyens et, eux-mêmes, se tournent vers nous pour être accompagnés. La crise sanitaire en est une des causes mais elle n’est pas la seule, beaucoup d’entre eux mettent en cause une pratique atrophiée par des politiques publiques de santé où domine un impératif de réduction des coûts et l’omniprésence d’un langage purement administratif.
Or, si l’époque est à la réduction des coûts, les besoins pour accompagner les personnes exilées ne font eux que grandir. La crise sanitaire a confirmé une tendance déjà présente en 2019 : les personnes que nous recevons au Centre Primo Levi, déjà touchées dans leur corps et leur esprit par la torture et la violence politique, font face à une forte précarisation de leurs conditions de vie et arrivent chez nous dans une grande détresse. Nos assistantes sociales accompagnent de plus en plus de familles qui dorment dans la rue. Un chiffre éloquent montre l’étendue du problème : 73% des personnes suivies par notre service social sollicitent une aide à la vie quotidienne, soit une augmentation de 33 points depuis 2019. Derrière ce phénomène se cache un problème d’accès aux droits et une tendance : la dématérialisation des services publics. L’incertitude, le parcours d’obstacles juridique et administratif qui en résultent s’ajoutent aux traumatismes liés à la guerre ou à la violence politique, ralentissant leur traitement. Or, ces traumatismes demandent une attention très particulière car la guerre et la violence politique ont cette même volonté de tourmenter, de violenter l’autre, d’annihiler le lien social.
En 2025, le Centre Primo Levi aura 30 ans. Renforcement du centre de soins, diffusion et partage de notre savoir-faire en direction des professionnels qui accompagnent les personnes exilées, programmation des futurs locaux… Autant d’actions engagées depuis deux ans pour consolider le projet associatif, accroître son impact et accompagner du mieux possible ces personnes qui ont vécu les bombardements, les violences et les humiliations.
Le Centre Primo Levi est une association de référence spécifiquement dédiée au soin et au soutien des personnes victimes de la torture et de la violence politique exilées en France. Dans son centre de soins situé à Paris, elle accueille chaque année plus de 400 personnes originaires de près de 50 pays différents. Fort de son expérience clinique, le Centre Primo Levi sensibilise et forme de nombreux professionnels engagés auprès des personnes exilées pour promouvoir une prise en charge adaptée. Enfin, il mène des actions de plaidoyer pour défendre l’accès aux soins et le droit d’asile.
En 2021 :
- 401 personnes suivies (179 femmes, 222 hommes, dont 86 mineurs)
- 52 % entre 25 et 44 ans
- 46 nationalités, en majorité d’Afrique subsaharienne (République démocratique du Congo, Guinée, Soudan), du Moyen-Orient (Afghanistan, Syrie, Turquie) et du Caucase (Tchétchénie, Géorgie, Ukraine)
- 26 % de nouveaux patients
- 5 272 consultations psychologiques, médicales, sociales et juridiques
- 73 % des personnes suivies au niveau social sollicitent une aide à la vie quotidienne (43 % en 2019)
- 30 % des nouveaux patients vivent dans une très grande précarité
- 149 patients suivis par le service juridique
- 29 formations pour 378 personnes formées
- 15 interventions extérieures et 500 personnes sensibilisées
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