Le plaidoyer du Centre Primo Levi en 2021

Article paru dans le rapport annuel 2021.

Liens institutionnels

Les rencontres avec les responsables institutionnels ou politiques sont une pratique courante du Centre Primo Levi et le signe que celui-ci est reconnu comme un interlocuteur fiable et légitime. Dans ce cadre, un entretien a été organisée en mars 2021 avec Clémence Olsina, directrice de l’asile au ministère de l’Intérieur. Il s’agissait d’évoquer avec elle les questions des problèmes d’accès à la plateforme téléphonique de l’OFII (Office français de l’immigration et de l’intégration), de l’absence d’hébergement stable et de la charge médico-psychologique pour certaines personnes convoquées à l’OFPRA (Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides), ainsi que de la sensibilisation des structures médico-psychologiques dans les territoires. Ce moment, passé dans les locaux du Centre, dans le 11e arrondissement de Paris, a aussi été une opportunité pour évoquer les modalités de partenariat et de soutien, tout comme le retard subi dans le lancement de la programmation des fonds européens pour la période 2021-2027.

Autre interlocutrice du Centre Primo Levi : Ève Plenel, conseillère Santé au Cabinet de la Maire de Paris, avec laquelle a pu être évoqué en octobre le partenariat avec la Ville de Paris, la question de la prise en compte des personnes « disparues » pour l’accès au logement social. Le Centre est aussi régulièrement sollicité par des institutions publiques ou associations pour partager son savoir-faire. La Défenseure des droits a ainsi sollicité une contribution sur le sujet de la santé mentale des enfants, qui a été intégrée dans son Rapport annuel 2021 dédié aux droits de l’enfant. Cette contribution mentionne, notamment, l’enjeu majeur de l’accompagnement psychologique des enfants exilés et l’état psychologique systématiquement dégradé des mineurs non accompagnés.

Actions collectives

Le cadre collectif du plaidoyer du Centre Primo Levi est très important, nous sommes membres d’InfoMIE, un centre de ressources sur les mineurs isolés étrangers, et participons aux travaux de l’Observatoire du droit à la santé des étrangers (ODSE) et de la Coordination française pour le droit d’asile (CFDA). Celle-ci s’est mobilisée contre le gel par l’État des visas de regroupement et de réunification familiaux. Cette coordination, avec des syndicats et des personnes étrangères concernées, avait saisi en 2020 le Conseil d’État en référé pour qu’il suspende sa décision. Le juge des référés a, le 21 janvier 2021, suspendu la décision du gouvernement de geler, au motif de la crise sanitaire, la délivrance de visas aux membres de familles pouvant bénéficier du droit de venir en France au titre du regroupement familial ou de la réunification familiale. Il a considéré que cette mesure portait une atteinte grave au droit à la vie familiale normale et à l’intérêt supérieur des enfants concernés.

Les événements en Afghanistan en août 2021 ont été marquants pour le Centre Primo Levi qui a pu accompagner plusieurs familles à sortir du territoire afghan malgré une grande incertitude qui a demandé une mobilisation forte. La CFDA s’est aussi mobilisée à travers une lettre ouverte au gouvernement français et aux organismes traitant de l’asile (OFPRA et CNDA) s’inquiétant des discours remettant en cause la légitimité, pour les Afghanes et Afghans, de demander asile et protection en France. Cette lettre ouverte a donné lieu à une entrevue avec Julien Boucher, directeur général de l’OFPRA, en décembre 2021.

L’accès à la santé est, avec le droit d’asile, un axe majeur de notre plaidoyer. Le Centre a ainsi participé au travail de sensibilisation engagé depuis 2019 par le collectif Dasem-Psy[1] autour de la question de l’évaluation de l’état de santé des étrangers susceptibles de bénéficier d’un titre de séjour pour raisons de santé. Depuis la Loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France, cette évaluation a, en effet, été transférée du ministère des Solidarités et de la Santé aux médecins de l’OFII. Or, les chiffres indiquent une diminution considérable d’avis positifs[2]. Et nombre de médecins constatent les conséquences de ces avis négatifs, suivis de refus des préfectures de délivrer des titres de séjour : dégradation de l’état de santé et des conditions de soins pour ces personnes gravement malades qui ne peuvent retourner se faire soigner dans leur pays. Cette question avait été au centre des Assises organisées par le collectif Dasem-Psy en mars 2021, que le Centre Primo Levi avait co-organisé[3].

Enfin, le Centre Primo Levi s’est fait le relais de la campagne de l’ANAFÉ (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers) contre l’enfermement administratif des personnes étrangères, et visant à faire connaître le régime de la zone d’attente au grand public.

Assemblée nationale

Le plaidoyer du Centre s’est aussi déplacé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale. En novembre, la Commission de l’Assemblée nationale sur les migrations, les déplacements de populations et les conditions de vie et d’accès au droit des migrants, réfugiés et apatrides a publié son rapport. Ses conclusions et recommandations, qui insistaient sur le respect des droits fondamentaux des migrants et personnes exilées, rejoignaient en grande partie les constats faits par le Centre Primo Levi. Ce rapport a été l’occasion de prendre contact avec les 37 députés de la Commission, afin de faire connaître l’action du Centre Primo Levi et d’échanger sur l’accompagnement des personnes exilés victimes de torture ou violence politique.


[1] Le collectif Dasem-Psy a été créé en 2018, à partir du constat de l’aggravation des conditions faites aux étrangers malades souffrant de graves troubles psychiques en lien avec la loi du 7 mars 2016, relative au droit des étrangers en France. Il regroupe quatre-vingts soignant·es (psychiatres, médecins, psychologues, mais aussi des juristes et intervenants sociaux) qui accompagnent des personnes étrangères souffrant de pathologies psychiques.

[2] Sur 225 500 titres de séjour délivrés à l’issue d’une première demande en 2018, 4 310 l’étaient pour raisons médicales (moins de 2 %) – « Personnes malades étrangères : des droits fragilisés, des protections à renforcer » – Défenseur des droits.

[3] En lien avec le COMEDE (Comité pour la santé des exilé.e.s), Université PARIS 13, Ethnotopies, Antigone 24, CN2R (Centre national de ressources et de résilience), Médecins du Monde, Orspere-Samdarra (Observatoire santé mentale, vulnérabilités et sociétés).