2016 a été une année riche pour le Centre Primo Levi. Nos actions de soin, de transmission et de mobilisation se sont déployées pour répondre au mieux aux besoins des personnes victimes de torture et de violence politique, et ce malgré un climat politique tendu et suspicieux à l’égard des populations exilées.
La publication du rapport Persécutés au pays, déboutés en France a constitué un des moments forts de l’année. Nous constations déjà depuis de nombreuses années qu’un nombre important de patients du centre de soins (53% des personnes soignées en 2016) étaient déboutés du droit d’asile en dépit des menaces qui continuent à peser sur eux. Ce rapport, grâce notamment aux nombreuses interviews menées, a permis de comprendre et d’expliquer comment ces personnes, qui entrent pourtant rigoureusement dans le cadre d’application du droit d’asile, passent à travers les mailles du filet de protection, et quelles sont les conséquences du rejet sur leur vie et leur santé. Ce rapport, le premier sur le sujet, a eu un large retentissement dans la presse et a été très bien accueilli par les professionnels travaillant avec des migrants. Il a également alimenté les réflexions sur l’accueil des victimes de torture et ouvert une discussion avec la CNDA sur les effets des traumatismes causés par la torture.
Par ailleurs, grâce au soutien de la Ville de Paris et d’un mécène privé, les capacités d’accueil du centre de soins ont pu être renforcées : un psychologue et un médecin supplémentaires ont été recrutés, le poste de kinésithérapeute a rouvert après quatre années de gel et le temps de travail d’une assistante sociale a été augmenté. Face à l’afflux de réfugiés sur le territoire francilien, le Centre Primo Levi, déjà saturé en temps normal, a reçu un nombre particulièrement important de demandes de prise en charge. Ces recrutements devraient permettre la prise en charge en 2017 d’une centaine de personnes en plus, soit une augmentation de nos capacités d’accueil d’environ 30%.
Concernant les patients reçus en 2016, nous constatons que le nombre de personnes de la République démocratique du Congo et des pays voisins est à nouveau en hausse. La variété des pays d’origine des patients admis en 2016 marque un triste record : 30 nationalités différentes, ce qui porte à 43 le nombre de pays représentés dans la file active globale. Nos patients sont aussi plus jeunes (59% des nouveaux patients ont entre 18 et 34 ans). Si la part d’hommes est à nouveau majoritaire, les familles sont de plus en plus nombreuses. Enfin la précarité sociale et juridique continue à faire des ravages chez la quasi-totalité d’entre eux : les difficultés à satisfaire les besoins primaires (hébergement, nourriture) et la complexité des démarches administratives minent encore et toujours le quotidien de nos patients.
L’autre fait marquant du Centre Primo Levi en 2016 concerne ses activités de formation. A la suite d’un gros travail de réflexion, notre offre de formation a connu de nombreuses améliorations afin d’être au plus près des attentes des professionnels. Un nouveau cycle a été mis en place avec 8 séances couvrant l’ensemble des problématiques de la prise en charge des victimes de torture (notamment sur les outils internationaux de lutte contre la torture, les aspects géopolitiques, la définition et les effets du trauma, l’exil, la prise en charge des enfants). C’est ainsi qu’en 2016, plus de 650 professionnels (psychologues, assistants sociaux, médecins, juristes…), bénévoles et étudiants ont été formés, en Ile-de-France mais aussi en région et à l’étranger. Toujours en lien avec la nécessité de transmettre et de partager sa clinique, le Centre Primo Levi est intervenu dans plus de 25 conférences, colloques, diplômes universitaires, ateliers de travail et autres, sensibilisant ainsi plus de 3 500 personnes à son travail et à la nécessité de soins adaptés pour les exilés traumatisés par les violences subies dans leur pays d’origine et pendant leur parcours d’exil.