Un nouveau président au Centre

Bonjour Antoine, vous venez d’être élu Président du Centre Primo Levi. Quel est votre parcours au sein de l’association ?

J’ai eu la chance d’être appelé, il y a trois ans, à siéger au conseil d’administration de l’association en tant que membre actif. Cette expérience m’a passionné. Michel Brugière, mon prédécesseur, m’a ensuite proposé de devenir membre du bureau et trésorier. J’ai donc eu l’occasion de participer de manière plus active et plus proche aux travaux de l’association.

A la fin de l’année 2013, Michel Brugière souhaitait passer la main et m’a amicalement suggéré de présenter ma candidature. Il trouvait que j’avais porté suffisamment d’attention au Centre Primo Levi pour assurer légitimement cette fonction et pensait par ailleurs que mon profil d’avocat pouvait servir à déployer l’association dans les domaines du plaidoyer, de la collecte et de la communication.Avez-vous hésité avant de vous lancer ?

Hésité, non, car à titre personnel l’idée m’a tout de suite plu. Mais j’ai réfléchi et étudié la question pour être sûr que cette présidence serait utile à l’association. A priori, je voyais plutôt un médecin pour présider le Centre, ou en tout cas une personne issue du monde médical. J’ai donc pris le temps de consulter les membres du Conseil d’Administration, en particulier l’association Trêve, qui regroupe les soignants ainsi que certains salariés du Centre Primo Levi. Globalement, l’idée a été très bien accueillie : j’ai donc décidé de présenter ma candidature.

Quel rôle entendez-vous jouer en tant que Président de l’association ?

D’abord, un rôle de présence et d’écoute, que chacun sache que je peux être présent pour soutenir un projet ou une réflexion, pour essayer d’anticiper ou de régler un problème. Pour bien connaître l’association, je sais que ce rôle sera nécessairement limité car le fonctionnement interne est extrêmement bien huilé.

Je sais aussi que beaucoup ne me connaissent pas encore et n’ont pas nécessairement l’idée ou l’envie de me solliciter. A ce sujet, j’ai proposé de réunir les salariés de l’association et les membres du CA pendant deux après-midi pour discuter du fonctionnement du Centre Primo Levi, de son financement, de ses outils de communication, de ses perspectives, etc. A la suite des deux après-midi de réflexion, j’aimerais proposer aux membres du Conseil d’Administration qui le souhaitent de s’investir dans tel ou tel sujet pour apporter assistance et conseil à l’association. C’est pour moi une part importante de la mission, car je suis là avant tout pour me rendre utile auprès de l’association elle-même.

Ensuite, je veux essayer de mettre à profit mes compétences personnelles au service de l’association dans les domaines du plaidoyer, de la collecte de fonds et de la communication. Ici aussi, de nombreuses choses sont déjà faites et bien faites, mais je serai disponible pour aider au développement et à la meilleure visibilité du Centre Primo Levi pour pérenniser et renforcer le centre de soin au service de nos patients.

Dans quel état d’esprit êtes-vous au moment d’entamer ce mandat de Président ?

Je suis heureux de collaborer au travail du Centre qui me touche et m’intéresse énormément.

A titre personnel, je me sens très concerné par cet étranger qui vient, qui arrive chez nous, dans ce village que nous pensons immense mais qui est tout petit. Pourquoi suscite-t-il autant de rejet ? C’est parce que nous sentons bien qu’il va nous obliger à regarder ailleurs, à nous désintéresser ne serait-ce qu’un instant de nous-mêmes, à regarder le monde réel, à regarder l’homme tel qu’il est. Dans nos sociétés dominées par le confort, le repli, l’individualisme, les relations virtuelles, le choc peut être violent mais il est salutaire. Un migrant qui arrive dans le plus complet dénuement est une chance (que nous mesurons mal) de nous retrouver face à lui, simplement humains. Ce migrant qui arrive, c’est aussi une énergie folle et blessée, qu’il faut savoir accueillir, canaliser, soigner. C’est notre responsabilité mais c’est là encore une chance car il peut beaucoup nous apporter.

L’accueil des migrants est certes un enjeu de solidarité, mais aussi de fraternité et d’opportunités. C’est aussi un enjeu de notre temps, un enjeu politique. Nombreux sont ceux qui veulent se barricader, mais de quoi se protège-t-on exactement en construisant des forteresses ?


Antoine Ricard est avocat aux Barreaux de Paris et de Bruxelles. Il a co-fondé le cabinet Ricard Ringuier en 2004, après avoir exercé à titre individuel pendant deux ans. En 2005, il a été élu 9ème secrétaire de la Conférence des Avocats du Barreau de Paris et s’est trouvé à ce titre chargé de la défense pénale d’urgence au service des plus démunis, une expérience fondatrice. En tant qu’avocat, il s’intéresse à la défense des droits de l’homme et exerce son métier avec une attention particulière envers ceux dont la situation de précarité sociale, physique et morale rend encore plus difficile le parcours judiciaire. Il a fondé et conseillé plusieurs institutions du secteur associatif. En 2011, il est devenu membre du conseil d’administration du Centre Primo Levi puis membre du bureau en 2012 avant d’en prendre la présidence en juin 2014.