Réforme de l’asile : rien n’est gagné…

“Un projet de loi sur le droit d’asile va être prochainement soumis à l’Assemblée Nationale. Le projet en l’état inquiète le Centre Primo Levi car il renforce un système à deux vitesses.”

Multiplication des procédures accélérées

“Le discours politique qui vise à lutter contre les “faux” demandeurs d’asile ayant justifié les réformes précédentes persiste. Alors que nous avons exigé publiquement au sein de la CFDA (Coordination française pour le droit d’asile) une procédure d’asile unique qui elle seule pourra garantir par un droit au séjour une égalité de traitement entre les demandeurs d’asile et par conséquent un accès effectif au droit d’asile (voir “Nos recommandations” ci-contre), ce texte projette une multiplication de situations de demandeurs d’asile qui seront soumis à une procédure « accélérée », appelée aujourd’hui « procédure prioritaire ». Ces cas sont largement fondés sur l’idée de fraude. Ainsi peuvent être soumis à une telle procédure celui qui a fourni de fausses indications, celui qui ne présente sa demande qu’en vue de faire échec à une mesure d’éloignement prononcée ou imminente, celui qui s’est maintenu irrégulièrement en France sans présenter sa demande d’asile dans le délai de quatre-vingt-dix jours à compter de son entrée en France….  La situation de ces demandeurs sera appréciée par l’administration. Certes, il est prévu que l’OFPRA puisse décider de changer de procédure en cours d’examen selon la situation de la personne, notamment en raison des violences graves dont elle a été victime (cette situation étant reconnue comme incompatible avec la procédure accélérée). Cette appréciation ne pourra pas faire l’objet d’un recours et dans le cas d’une procédure accélérée, les demandeurs auront moins de temps pour exposer leurs craintes de persécutions. En cas de rejet de l’OFPRA, leur recours sera soumis à un juge unique. ”

Préconiser de telles situations est méconnaître la situation des réfugiés qui arrivent en France, souvent très isolés, désorientés, atteints psychologiquement et physiquement, mal conseillés. Dans la peur d’être dénoncés dans leur pays d’origine, ils ne donnent pas de prime abord toutes les informations les concernant. De plus, la mesure d’éloignement en question est envoyée de façon systématique sans examen de situation après la décision de rejet de la CNDA. Le demandeur qui présente des faits nouveaux pour le réexamen de son dossier se retrouve alors dans cette situation alors même qu’il a des éléments sérieux à soumettre à l’OFPRA.”

Une menace directe pour les patients du Centre Primo Levi

“D’autre part, le projet de loi sur l’immigration, texte qui concerne également les patients du Centre Primo Levi, a pour but notamment de renforcer les mesures d’éloignement. Les déboutés du droit d’asile sont particulièrement visés. Si le projet est voté en l’état, ils n’auront que sept jours contre 30 jours aujourd’hui pour effectuer un recours, ce qui est très court pour permettre à la personne de se défendre. L’administration disposera de moyens supplémentaires pour procéder à des arrestations. Bon nombre de patients peuvent se retrouver dans cette situation. Alors qu’ils n’ont pas obtenu le statut de réfugié, ils craignent des persécutions dans leur pays d’origine. Dans quelle mesure pourront- ils se prévaloir du droit d’asile pour faire le réexamen de leur demande d’asile ou du droit des étrangers pour une demande de titre de séjour ? Et surtout dans quelles conditions ? Combien seront-ils à être passés par la procédure accélérée, combien auront eu le temps ou non de bénéficier de soins, d’un soutien psychologique pour pouvoir dans les meilleures conditions demander l’asile à la France ?”

“L’administration française serait-elle infaillible pour penser que tous les déboutés du droit d’asile sont des fraudeurs et ont donc vocation à être renvoyés dans leur pays ?”