Adopté en juin 2020, le plan d’action du Centre Primo Levi ouvrait un nouveau chapitre dans l’histoire de notre association. Natalie Nougayrède, membre du conseil d’administration, en explique les objectifs et réalisations.
Pourquoi décider en 2019 de la mise en place d’un plan d’action ? Quels étaient les besoins ?
Natalie Nougayrède : Ce plan d’action marque une étape importante pour le Centre, et il intervient environ 25 ans après sa création. Le Centre Primo Levi a depuis un quart de siècle déroulé son histoire, avec de grandes réalisations mais aussi des constats de limites. Le moment était venu de donner plus de moyens et de meilleures conditions pour l’action du Centre mais aussi de résoudre la question des limites rencontrées. Pour les membres de l’équipe, pour le conseil d’administration, pour tous ceux qui soutiennent le Centre Primo Levi, la motivation centrale, au cœur de leur engagement, est d’arriver à aider encore davantage celles et ceux que le Centre a vocation à soigner et secourir. Le Centre Primo Levi accueille entre 400 et 500 personnes par an, en flux continu. Nous savons bien que les besoins sont beaucoup plus importants, et vont croissant, de la crise dite des réfugiés en 2015 à la guerre qui vient d’éclater au cœur de notre continent. Plus de 130 000 personnes, exilées, et qui ont subi des tortures dans leur pays d’origine ou dans les pays traversés, se trouvent actuellement en France. Le Centre Primo Levi accomplit une mission formidable, il faut le consolider pour l’avenir, lui donner plus de moyens d’action. Ce ne sont pas des mots prononcés à la légère car au bout du compte, cela impacte des vies. Ensuite, nous ne sommes pas naïfs, nous sommes dans un environnement où chaque association doit se battre pour sa pérennité, pour ses ressources. Si notre structure est unique aujourd’hui, elle peut ne pas l’être de manière indéfinie. Il y a une réflexion qui porte sur les enjeux de consolidation et de survie de l’association sur la durée, c’est une approche réaliste. Évidemment, au long de son histoire, le Centre Primo Levi a connu des évolutions, comme le développement de la formation, la mise en place d’actions de plaidoyer, la levée de fonds et de dons. L’équipe s’est étoffée, et ce qui était au départ un centre de soins est devenu une organisation encore plus multidisciplinaire, avec des dimensions supplémentaires et essentielles, tout cela est né d’une riche histoire. Ce plan, auquel nous avons commencé à réfléchir en 2018, a comme objectif de redynamiser notre association, de préparer l’avenir. C’est un nouveau chapitre.
Quelles ont été les modalités de construction de ce plan ? Comment s’est impliqué le conseil d’administration ? Quel était le rôle des salariés ?
ND : Il y a dans ces modalités de grands enjeux de conduite du changement, de communication. Nous voulions réaffirmer une culture de la coopération, c’est une volonté qui a traversé toute l’organisation. Cette culture existe, malgré des secousses, des interrogations. Le Centre Primo Levi, comme toute structure humaine, peut avoir ses accrocs ou défauts mais il offre aussi un formidable croisement de profils, de savoir-faire, d’engagements, qui font sa richesse. Dans l’équipe, au conseil d’administration, dans l’« univers» du Centre Primo Levi, personne n’oublie son cœur de mission. Pour l’élaboration du plan, nous avons déployé une stratégie avec des étapes, des moments de dialogue et de restitution, entre le conseil d’administration et les salariés, ainsi que des réunions du conseil d’administration spécifiques pour valider les étapes. Je dirais qu’un des moments forts a été la journée CA-salariés organisée en juin 2021, voici près d’un an. Nous avions mis en place quatre groupes de travail, selon quatre axes : renforcer le centre de soins, améliorer l’organisation interne et la gouvernance, développer l’ouverture vers l’extérieur et trouver de nouveaux locaux. Chacun de ces groupes a travaillé de l’automne 2020 au printemps 2021, moment où ont été restituées leurs analyses et recommandations. Chaque groupe était co-piloté par un membre de l’équipe salariée et un membre du conseil d’administration. Nous avons voulu autant d’espaces de dialogue que possible, tout en tenant compte bien sûr de la crise sanitaire. Étant donné ces circonstances, le travail a été assez admirable. Nous étions vraiment dans un souci de discussion croisée, horizontale, sans se précipiter mais en respectant un calendrier.
Pouvez-vous résumer les grandes tendances de ce plan d’action ?
ND : En 2025, le Centre aura 30 ans. À cette échéance, et pour se projeter vers la décennie qui suivra, il aura un impact plus grand, avec plus de moyens. Le plan d’action vise à permettre cette ambition. L’association fonctionnera mieux, rayonnera encore plus. Le centre de soins sera renforcé, avec de meilleures conditions de travail. Le savoir, l’expertise et le travail de témoignage du Centre Primo Levi seront diffusés de manière beaucoup plus importante à travers la formation, la communication et le plaidoyer, le tout avec plus de clarté. Le Centre aura de nouveau locaux, adaptés. Pour aider mieux et plus de personnes, il faut plus de moyens et permettre les conditions d’une certaine créativité pour tous.
Le plan a été adopté en juin 2020, quelles sont les actions déjà mises en place ?
ND : Une dynamique est enclenchée, il est important de le souligner. Elle se poursuit, avec des ajustements, il y a un souci de bien faire. Nous savons dans quelle direction nous voulons aller, nous avançons par étape. Les jalons concrets sont déjà posés. En particulier pour les enjeux liés à la formation. La diffusion du savoir-faire du Centre Primo Levi, la communication, l’amplification et l’animation de communautés, l’ouverture vers l’extérieur, sont des domaines de réflexion intenses maintenant, et en se tournant vers de nouveaux outils. Il y a aussi la volonté de réfléchir à l’organisation interne et à des enjeux de vie de l’association, comme le règlement intérieur, les statuts, ainsi que d’autres avancées s’agissant des nouveaux locaux. C’est un processus en cours, avec des étapes concrètes importantes, qui nous engage individuellement et collectivement.