Santé mentale des personnes exilées : une souffrance invisible

Communiqué de presse : sous embargo jusqu’au 20 juin à 06h00

Depuis une dizaine d’années le Centre Primo Levi constate une évolution préoccupante de la santé mentale des personnes exilées, aggravée par les violences qu’elles subissent sur le chemin de l’exil, désormais omniprésentes et inéluctables. Torturées, emprisonnées, violées, elles fuient leur pays et accumulent les traumatismes tout au long de leur parcours d’exil jusqu’en France.

La France est l’un des trois principaux pays d’accueil de demandeurs d’asile en Europe. Elle est appelée à être de plus en plus sollicitée par des personnes qui fuient les conflits armés et la violence, malgré les barrières physiques ou législatives mises en place ces dernières années. Ces personnes, qui demandent la protection de notre pays et dont la santé mentale se détériore, ont besoin d’être soignées. Au vu de la gravité de leurs troubles psychiques, du nombre de personnes concernées et de leurs fortes interactions avec la société, leur souffrance constitue une réalité incontournable et un véritable enjeu de santé publique. Il s’agit aussi plus largement d’un enjeu de société, car la majorité des personnes exilées arrivées en France ont vocation à y rester et à y travailler. La prise en compte de leur souffrance psychique fait partie de l’accueil et des étapes vers une intégration réussie.

« Pourtant, comme nous le soulignions déjà en 2018, le système de santé actuel ne répond pas à cet enjeu. L’offre de soins en santé mentale pour les personnes exilées demeure largement sous-dimensionnée. Le recours au secteur associatif est incontournable. Faute de système de santé adapté, le dispositif d’accueil existant en France peut-il offrir un repos, à défaut de répit, à cette souffrance psychique ? Si des avancées ont été réalisées, les conditions de prise en charge des patients se sont dégradées, restent inadaptées aux besoins et aléatoires selon les régions. Les conséquences psychologiques sont considérables. L’incertitude, le manque de ressources, la vie en collectivité dans les centres d’accueil ou les hôtels sociaux, le changement très fréquent d’hébergement, la promiscuité importante, le manque d’intimité, parfois l’insécurité, ravivent le traumatisme et parfois même le créent » affirme Antoine Ricard, président du Centre Primo Levi.

Comment une personne exilée peut-elle convaincre l’administration française du bien-fondé de sa demande d’asile sans soigner cette souffrance, qui peut se traduire par une amnésie, une perte des repères spatio-temporels et une difficulté à élaborer un récit détaillé et chronologique ? Comment convaincre, en vivant dans un hôtel vétuste, saturé, en état d’hypervigilance permanente, sans pouvoir véritablement se reposer, ni dormir normalement ? Comment peut-elle ensuite s’intégrer?

La santé mentale des personnes exilées est une souffrance invisible en France. Les lois sur l’immigration et l’asile se succèdent sans prendre en compte la spécificité psychologique, sociale ou économique de ces personnes. Les mots « santé mentale » sont ainsi totalement absents de la dernière loi immigration. Le gouvernement français a fait le choix d’une politique de contrôle dans laquelle des dizaines de millions d’euros sont chaque année investis. Pour quel résultat ? Les associations qui travaillent au quotidien avec les personnes exilées le disent depuis très longtemps : un accueil digne, humain et adapté est la réponse la plus efficace et la moins coûteuse à terme.

A l’occasion de la Journée internationale des réfugiés, le Centre Primo Levi publie son rapport « Santé mentale des personnes exilées : une souffrance invisible », et demande que celle-ci soit enfin considérée comme un véritable enjeu de santé publique et de société.


Le Centre Primo Levi est une association spécifiquement dédiée au soin et au soutien des personnes victimes de la torture et de la violence politique exilées en France. Dans son centre de soins situé à Paris, elle accueille chaque année plus de 400 personnes originaires de près de 50 pays différents. Fort de son expérience clinique, le Centre Primo Levi sensibilise et forme de nombreux professionnels engagés auprès des personnes exilées pour promouvoir une prise en charge adaptée. Enfin, il mène des actions de plaidoyer pour défendre l’accès aux soins et le droit d’asile.

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