Sabrina Goldman est membre du bureau du Centre Primo Levi, elle revient sur les raisons de son engagement, à la croisée de son parcours associatif et professionnel.
Pourquoi le Centre Primo Levi ?
Mon implication dans le Centre, qui remonte à 2019, est le fruit de plusieurs engagements militants que j’ai ou que j’ai eus, notamment en tant vice-présidente de la LICRA pendant plusieurs années. Je suis à la fois très sensible d’une part à l’histoire du Centre et à son nom, en référence au témoignage d’un rescapé de la Shoah et d’autre part à son action auprès des personnes exilées qui sont l’objet de racisme et de xénophobie. Par ailleurs, en tant qu’avocate, j’ai eu l’honneur de défendre Cédric Herrou, qui est un symbole de la lutte pour les droits des personnes exilées. Donc cette affaire m’a évidemment beaucoup alertée sur la nécessité de soigner, soutenir, défendre les personnes exilées en France qui ont subi la torture ou la violence politique dans leur pays d’origine.
Quel est votre regard sur l’action du Centre ?
Il s’agit d’une association qui a un champ de compétence très spécifique, à savoir le soin et l’accompagnement des personnes exilées victimes de torture ou de violence politique ; de ce fait, elle est reconnue avec cette « marque de fabrique ». Sa parole est rare, juste, mesurée, elle doit rester « au-dessus de la mêlée » de certaines polémiques politiques.
Qu’avez-vous retenu de 2023 ?
Le vote de la loi immigration a été un moment difficile, heureusement le Conseil constitutionnel a permis d’éviter la mise en cause de certains droits fondamentaux. Mais elle demeure une réforme dangereuse pour les droits des demandeurs d’asile. Le Centre s’est mobilisé autour de cette question, et notamment au sujet de la prise en compte de la spécificité de ses patients, victimes de tortures et de violences politiques. Cela doit se poursuivre en 2024, il faut que la question de la santé
mentale des personnes exilées soit une vraie préoccupation des pouvoirs publics. Il faut qu’il y ait une prise en compte de la spécificité psychologique, sociale, économique de la situation de ces personnes-là. Les 30 ans du Centre seront aussi un moment important de visibilité pour effectivement sensibiliser le plus grand nombre sur la nécessité d’accueillir, et de soigner les personnes exilées et mettre en avant notre mission de transmission.
Comment faites-vous le lien entre votre profession d’avocate et votre engagement dans le Centre ?
Pour moi, le processus de soin des personnes exilées passe aussi par la reconnaissance de la légalité de leur présence en France. Tant qu’il y a une insécurité juridique, je pense qu’effectivement il s’agit d’un obstacle au soin. Donc cela passe par l’octroi d’un statut administratif. L’accompagnement juridique fait partie des actions du Centre, même si ce n’est pas le coeur de son accompagnement. De manière plus générale, en tant qu’avocate, on a forcément la défense des droits chevillée au corps, donc je porte une grande attention au respect des droits fondamentaux. Un militant est souvent par nature un avocat dans l’âme.