L’accès à l’administration reste, malgré une légère amélioration, très compliqué pour nos patients qui doivent être nécessairement accompagnés pour y parvenir.
« Il existe toujours cette difficulté d’accéder à l’administration. Une fois le dépôt du dossier fait, le délai d’attente est très long. Cela a toujours été le cas : nous attendons pour le rendez-vous, et puis pour l’instruction du dossier », témoigne Aurélia Malhou, juriste au Centre Primo Levi.
La situation n’est toutefois pas aussi critique ou tristement absurde que l’année dernière où Aurélia devait se « connecter aux sites internet des différentes préfectures et documenter l’absence de rendez-vous disponible en prenant des captures d’écran ». Dans beaucoup de cas, le seul moyen pour obtenir un rendez-vous était le recours au juge administratif par un référé mesures utiles. Une année après, en 2022, la situation a évolué vers la généralisation de la numérisation des démarches, que cela soit au niveau de la procédure d’asile, de la demande de titre de séjour, de la demande de nationalité ou de réunification familiale. Pour Aurélia, c’est « une amélioration en demi-teinte », car, même pour les professionnels et bénévoles qui accompagnent les personnes exilées, l’information reste difficile à trouver. Ces procédures intégralement dématérialisées demandent d’être francophone et d’accéder à du matériel informatique, ainsi qu’à une connexion Internet, et sont ainsi difficilement accessibles pour des étrangers en situation de précarité. L’aide d’associations ou des services d’accueil des préfectures, quand ils existent, devient indispensable. « Les patients dépendent beaucoup de nous : ils n’ont pas d’Internet, d’ordinateurs, de scanners… L’accompagnement est constant : il faut créer un compte sur le site de la préfecture, créer une boite mail, scanner et déposer les documents sur la plateforme. »
Aurélia se souvient de M. A., un patient d’origine bosniaque. La Bosnie-Herzégovine étant considérée comme un pays d’origine sûr par l’OFPRA, sa demande d’asile fait l’objet d’une procédure accélérée, avec des délais restreints. Persécuté dans son pays, des enjeux politiques, historiques et familiaux se mêlaient dans son besoin de protection. Sa demande d’asile a d’abord été rejetée. Il a alors fallu demander un réexamen. « Pour un réexamen, nous retravaillons le récit écrit. Je reprends et j’identifie les manques, et je prends en compte les motifs de rejet. » Ce récit complété doit inclure des éléments nouveaux, que la personne a appris après la décision de la CNDA ou qu’elle n’a pas pu évoquer en raison de sa vulnérabilité. Il faut alors réfléchir à de possibles témoignages donnés par l’entourage et rassembler des preuves matérielles pour appuyer ces nouveaux éléments. « Si la demande est recevable, tout va être réexaminé, donc nous reprenons tout le dossier. » Une patience et une volonté qui portent leurs fruits : M. A. a finalement obtenu une protection subsidiaire. « Quand cela fonctionne, c’est très satisfaisant. Une confiance s’installe avec les patients, une confiance dans l’ensemble du Centre. »
Les chiffres
- 130 patients ont été suivis par le service juridique
- 8 patients ont obtenu un titre de séjour. 10 patients ont obtenu une protection internationale (sur 23 dossiers suivis). 2 procédures de réunification familiale ont pu aboutir