Anahita est une jeune afghane, suivie au Centre Primo Levi. Elle est arrivée en France il y a plusieurs années après un long périple d’exil. Elle nous a raconté pourquoi elle a choisi de participer à notre projet d’escalade et ce que cela lui apporte dans sa vie quotidienne.
Pourquoi tu t’es intéressée à l’escalade?
La psychologue qui me suit au Centre Primo Levi m’a parlé des séances qui étaient organisées pour les patients. J’en avait un peu fait au lycée en France, j’ai voulu continuer. C’est un sport où il faut se surpasser, il faut analyser en permanence, il faut calculer les prises. Souvent on n’y arrive pas, il faut alors descendre, recalculer avant de prendre à nouveau son élan. Je suis quelqu’un de très angoissé habituellement mais pendant les séances d’escalade, je tente des choses. Je vois ensuite ce que ça donne, parce que plus je vais haut, plus j’ai peur mais plus j’essaie de continuer.
Est-ce que tu peux me raconter la première séance, comment te sentais tu?
La première séance était plutôt basée sur la maîtrise des équipements, sur comment assurer son camarade. Thomas, du Comité alpin français était avec moi, il m’expliquait comment donner du mou, comment « sécher », comme on dit. La personne que j’assurais, qui était aussi un patient du Centre, était un peu perplexe, il doutait un peu, ce qui est normal. Hélène, du Centre Primo Levi, était aussi là, et l’a rassuré. Moi je faisais mon possible pour que tout aille bien, quitte à demander plusieurs fois si l’équipement était bien en place, si j’étais bien attachée. Mais je pense que pour un premier jour, ça s’est très bien passé.
Est-ce que tu as commencé à grimper lors cette première séance ?
Oui, en fait, ça m’a tenté. J’ai expliqué que j’avais peur mais que j’allais essayer. Et comme par hasard, dès que j’ai posé le pied sur la première prise, tout s’est débloqué. Sauf que plus j’arrivais haut, plus l’angoisse montait, je sentais le vide, même si j’étais attachée. C’était très impressionnant. Je savais que j’étais en sécurité, mais j’avais cette sensation de ne pas être forcément protégée.
Vous vous rejoignez toutes et tous dans un café avant les séances, ce sont des moments importants pour toi ?
Oui, c’est important parce que ça me permet de sociabiliser, parce qu’habituellement je n’aime pas les endroits où il y a trop de monde. Là, nous parlons de tout et de rien. Certains rencontrent des compatriotes. Si je veux, je peux ne pas venir, rien n’est obligatoire, mais je fais en sorte d’être tout le temps là.
Que t’a apporté l’escalade, notamment par rapport à ton vécu ?
Ça a été une étape très importante pour moi. Tu penses à l’escalade et tu te dis : c’est possible. Oui, je peux le faire. Jusqu’en haut. C’est important dans ma vie quotidienne. Par exemple, quand j’ai des moments de découragement, je repense à ce que j’ai fait pendant ces séances. Il n’y’a pas que les muscles qui comptent dans l’escalade, le mental est aussi très important.