Jules* est né en Guinée en 2001, il a 19 ans. Il est arrivé en France en 2017. Lors de son premier rendez-vous au Centre Primo Levi, il y a deux ans, il fait part au psychologue clinicien qui le reçoit de son parcours d’exil et des maltraitances qu’il a subies dans son pays d’origine. Orphelin, il est pris en charge par un oncle puis par une connaissance de la famille, Marc, membre actif d’un parti d’opposition guinéen.
En 2017, sa vie bascule. Lors d’une action politique aux côtés de Marc, il est poursuivi par les forces de l’ordre, prend la fuite, est blessé et arrêté. Il passe deux nuits en détention. Après sa libération, il est pris en charge par une connaissance du parti qui organise son départ de Guinée pour la France, sa vie étant en danger.
Les symptômes qu’il présente lors de ses consultations au Centre Primo Levi sont directement liés aux violences qu’il a vécues. Il souffre d’insomnie, mais aussi de flash-back des scènes de violences qu’il a connues, notamment pendant l’arrestation. Pendant les consultations, il s’arrête fréquemment de parler et les larmes coulent sur son visage sans qu’il puisse maîtriser ses émotions. De plus, il est atteint de coliques néphrétiques, une pathologie très douloureuse. Le médecin généraliste qui le suit au Centre Primo Levi est amené à demander pour Jules plusieurs hospitalisations en urgence. Début 2020, sa situation médicale s’est stabilisée, mais les symptômes liés au parcours d’exil ont pris le devant, notamment son impossibilité à dormir.
A ce cadre clinique s’ajoute la situation de précarité de Jules. Lors de son arrivée en France, alors qu’il est encore mineur et se trouve dans l’agglomération bordelaise, il n’est pas pris en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE). Comme beaucoup d’exilés adolescents, sa minorité est remise en question, il est considéré comme un majeur sans papiers. Jules est confronté au non-accueil. Alors qu’il ne sait pas où dormir ni comment trouver de quoi se nourrir, il est placé en garde à vue plusieurs jours à Bordeaux, tandis que la police mène une enquête pour vérifier qu’il est vraiment arrivé seul en France et qu’il est bien orphelin. Après sa sortie de garde à vue, il décide de se rendre à Paris, pour ne pas se voir délivrer une obligation de quitter le territoire français (OQTF).
Lors de son arrivée à Paris, il trouve refuge dans une église où il dort la nuit dans des conditions très difficiles. Passionné par le sport, il trouve une place dans un club de basketball du 12e arrondissement où il aide l’entraîneur à encadrer des groupes de jeunes. Alors qu’il est en France depuis l’âge de 16 ans, ce n’est qu’en 2020 – et majeur – qu’il dépose sa demande d’asile et à ce titre trouve une place dans un centre d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) grâce à l’accompagnement social du Centre Primo Levi, ce qui lui permet d’avoir un cadre plus sécurisant. Il envisage alors de reprendre ses études. Sur les conseils d’une assistante sociale du Centre, Jules s’inscrit aux cours du soir proposés par la mairie de Paris. Il a ainsi pu intégrer un lycée en Ile-de-France et pourra bientôt passer son baccalauréat.
Cet accompagnement a permis à Jules de préparer plus sereinement avec la juriste du Centre Primo Levi le récit qu’il allait devoir déposer dans le cadre de sa procédure de demande d’asile. Après un premier rejet de l’OFPRA, il a obtenu début mars le statut de réfugié après son audience devant la Cour nationale du droit d’asile.
*Le prénom et certains éléments ont été modifiés afin de respecter l’anonymat de nos patients.