Mémoires n°74 – mai 2019 Prix : 8 euros (papier) / gratuit (en ligne) ÉDITO Forêts,familles

On passe sa vie à l’ombre de sa famille.

D’ailleurs la famille c’est un arbre.

Ombre apaisante, ombre inquiétante.

Ses racines plongent dans la terre et dans le temps.

Ses branches montent et s’éloignent, vers le soleil.

Ses feuilles volent au loin dans un mouvement perpétuel de vie et de mort.

Ses graines voyagent dans le vent.

C’est de la sève à partager, un écheveau de liens, un élan de vie, une autorité, une force qui résiste à la violence des éléments jusqu’à un certain point, jusqu’au feu, jusqu’au génocide.

Forêts, familles.

Deux peuples qui se côtoient, se respectent et s’entraident.

Liés dans l’exil quand l’arbre donne le fruit du chemin, la fraîcheur du repos et le bois du bateau.

Ligués pour capturer la chaleur du monde, la pacifier et la transformer.

Ecosystèmes, conservatoires de la vie et de la diversité.

Alors, quand la famille est atteinte par la violence, c’est une forêt qui brûle, c’est l’essentiel qui est en cause, c’est un souffle coupé. Un être souffrant dans une famille souffrante, c’est un incendie au beau milieu des flammes.

À chaque fois que la violence d’un homme s’abat sur un autre, le pire devient possible ; quand elle s’abat sur les familles, le pire devient certain.

La violence se déchaîne et atteint ce qui nous lie : la famille, ce pays des humains, ancestral, légendaire, primordial.

Peuple premier, forêt primaire, Primo Levi.

Le Centre Primo Levi aussi est une famille.

C’est avant tout une équipe de professionnels chevronnés mais ils sont animés d’une même sève, ils font autorité, ils soignent et ils transmettent : c’est une famille.

Ce mot est l’occasion pour moi de leur rendre hommage. Ils font du Centre Primo Levi un arbre auprès duquel il fait bon se reposer, ils se battent contre la violence avec le soin pour seule arme.

Armée des ombres contre l’obscurité.

Antoine Ricard, président du Centre Primo Levi

Les articles de ce numéro :