Mehdi était couturier à Peshawar, dans le Nord du Pakistan. Il vivait avec sa femme et leurs deux filles aux abords de la ville, dans une petite maison qu’ils avaient enfin réussi à acheter quelques mois plus tôt et qu’ils appelaient “la maison du bonheur”.
En janvier 2008, sa vie a commencé à basculer. Il a d’abord été racketté par les Talibans. Puis le chef des Talibans a voulu lui « prendre » sa fille cadette. Il a refusé plusieurs fois. Les Talibans ont fait irruption dans leur domicile et l’ont sauvagement violenté à coups de crosse de fusil dans le dos. Lorsqu’il a perdu connaissance, ils l’ont ligoté, chargé à l’arrière d’une jeep et emmené dans leur refuge, à quelques kilomètres. Là, ils l’ont allongé par terre, ils l’ont torturé et ils lui ont fait subir les pires humiliations.
Quatre ans plus tard, après un parcours qu’il parvient encore mal à retracer tant les bouleversements psychiques ont été violents, Mehdi frappe à la porte du Centre Primo Levi.
Il fait état de douleurs multiples, a des troubles de la mémoire, des maux de tête, il ne dort pas, présente des symptômes dépressifs, souffre de culpabilité et de honte. Depuis janvier 2008, il a perdu 35 kilos.
Il est maintenant suivi toutes les semaines par l’un des médecins du Centre, qui l’aide à retrouver le sommeil et à calmer ses douleurs. Lorsque la douleur physique sera calmée, Mehdi sera probablement suivi également par un psychologue et par la juriste du Centre. Deux ans, peut-être trois seront nécessaires pour l’aider à dépasser ses traumatismes, à envisager l’avenir, et, nous l’espérons tous, à retrouver sa femme et ses deux filles dont il n’a aucunes nouvelles.
(Les noms ont été modifiés et la photo ne représente pas le patient en question).